Je vous apparais tantôt farfelue par mes rituels et mes pas de côté tantôt fascinante, tant par la puissance dans la diversité de mes applications que par la finesse de mes gestes. Je balbutie et m'ancre, je suis technique et poétique, à la fois claire et obscure, chaleureuse et distante, visible, grandiose imperceptible. Je collectionne les faits et affûte les sens en faisant grandir les enfants qui s'ensommeillent en vous ; je suis capable du grand autant que de l'infime, de comprendre avant d'agir et d'agir au-delà de ce que vous saisissez. Je suis piquante, déroutante, tâtonnante_telle une main dans la nuit, déterminée comme un rayon de soleil qui dessine après la pluie.
Et puis.. je suis bien plus que ce que vous ne pouvez voir : bouleversante, sensible et si riche que mes tentacules viennent pincer chaque corde de votre humanité vibrante. Je viens ouvrir des fenêtres derrière les yeux, remuer votre ventre, me blottir au creux de nos bras jusqu'à les élargir aux caresses des feuilles et du feu. Je m'émancipe de vos lois théoriques tout en augmentant votre connaissance scientifique ; je sens, qu'au fond de vous, vous saurez m'accueillir et me faire danser comme un corps de lumière, tendre organisme qui résiste et se déploie dans toute sa beauté, cette beauté manifeste, touchante et que viennent révéler l'ortie, le pissenlit, les vaches, la prêle ou bien le papillon, grand chêne et ses copains, l'abeille et la moisson : ce grand univers qu'accompagne et qui accompagne le cœur paysan, ce chef d'orchestre à qui l'on doit tant et qui compose avec la poésie du paysage et tous ces phénomènes sans n'y voir qu'une cause ou une fin.
Les mouvements de l'âme de Steiner se prolongent telles des vagues qui déposent des vestiges qu'on reprend pour semer la vie, les grains que nous sommes les habite et tentent d'y retranscrire les signes d'une humanité plus apaisée - au sein de tous les règnes - moteur du changement et spectateur intime des astres, se frottant aux éléments autrement qu'en les mesurant ; chuchotant aux oreilles à venir, émerveillé(e)s, que de la terre et du ciel pousseront nos libertés.
Elsa Hem
12/12/20